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Eclat de Vie
14 août 2013

Mon papa

Il était mon sol, ma source, ma racine, il était le rocher sur lequel je me suis construite.

Celui qui était là en toute circonstance sans me juger, celui qui applaudissait mes succès, me soutenait dans les moments difficiles avec ses mots parfois maladroits, mais toujours justes et sincères. Celui qui m'a appris à marcher, à faire du vélo, celui qui voulait que je fasse du sport et de la musique, celui qui m'a conduit dans l’église le jour de mon mariage, celui que j'ai fait voyagé de Marseille à Bruxelles, en passant par Amsterdam, et Malte. Il m'aurait suivie partout où que j'aille, quoi que je fasse. J'étais sa chounette, son bébé comme il disait. J'avais beau lui dire que j'avais grandit ... pour lui ça changeait rien. Il m'aimait infiniment, passionnément, inconditionnellement. Il y avait dans ses yeux une lumière qui s'allumait dès que je franchissais la porte. Une lumière de fierté immense et de joie.

C'était un homme heureux. malgré la rudesse de sa vie. Il puisait son bonheur dans les petits plaisirs simples : un apéro, enfin un ricard, un tiercé, un match de football ou de rugby, une partie de belote, un après midi à la pèche, un bon repas en famille, une chanson d'Elvis... Mais ce qui le rendait heureux par dessus tout, c'était de nous savoir heureux. Il pouvait passer des heures à regarder nos photos et nos vidéos ... Il avait un sens aigu de la famille, lui qui n'en n'avait pas eu.

C'était un homme joyeux. avec un humour décalé, des jeux de mots pourris qui le faisait mourir de rire. Et on riait de le voir rire. Son rire ...son rire résonne encore dans ma tête.

C'était un homme généreux, toujours présent pour les siens. Prêt à donner sa chemise, et même plus si besoin. Il aimait profondément les gens, était familier avec tout le monde sans faire de distinction, aucune. Il aimait son métier. Il était barman. Ou plutôt un showman derrière un bar. Avec lui c'était spectacle permanent. "Royal au bar". C'était un titi parisien, un vrai comme on fait plus.

C'était un homme opiniâtre avec des idées bien tranchées sur tout. Il était comme un volcan qui devient tout rouge, il s'emballait pour un rien mais s'en voulait juste après d'avoir été trop loin. On le savait ... alors souvent on laissait faire et on se moquait de lui après, ça le faisait marrer : "bande de nanaaaaards"

C'était un grand père merveilleux qui jouait, chantait, faisait le clown pour faire rire ses petits enfants. Tout était prétexte à les amuser. C'était leur papi-llon. Nathan l'adorait.

Il a fait un dessin pour que papi l'emmène dans son dernier voyage.

Parce que oui. Il est parti.

Il est des êtres qui sont tellement forts et qui font tellement partie de nous qu'on les croit éternels. Je le croyais éternel.

Jamais je n'aurais pu penser qu'un jour il ne serait plus là.

On pense pas à ces choses là.

Et pourtant. Quand je l'ai appelé pour la fête des pères, 2 jours avant son opération, en raccrochant j'ai pleuré. J'ai pleuré car je pensais que c'était peut être notre dernière conversation.

Même si je l'avais senti, mon cœur de petite fille refusait obstinément de l'entendre.

Je suis rentrée vite en France pour le voir. pour lui dire combien je l'aime. combien on a tous besoin de lui ici. combien j'ai confiance en lui et je sais qu'il est fort. J'ai haïs ces tubes qui lui défiguraient le visage. J'ai haïs ces médecins qui le charcutaient et qui ne nous ménageaient pas. J'ai haïs cet endroit froid, angoissant, bruyant.

Je lui ai dit que tout irait bien. J'ai tenu sa main, je lui ai fait des soins. Je lui ai dis que je repartais pour Montréal mais que je reviendrais dès qu'il serait remis.

Je le croyais éternel. Un papa ça meurt pas. Mon papa il meurt pas...

Et puis il y a eu cette nuit. le téléphone. et l'attente.

Et puis il a eu ces mots : "Il est parti Céline. Il est parti. "

Et puis il y a eu cette douleur. tranchante. insupportable.

 


 

Je suis rentrée à Paris, avec GG, les enfants et Régis mon frère.

Maman, Régis et moi  sommes allés l'annoncer à ma grand-mère qui vit dans une maison de retraite à Romorantin. Elle a été admirable dans son chagrin, digne comme une grande dame qu'elle est : "Il faut prendre les choses comme ça vient".

Je n'ai pas pu aller voir le corps.

Je n'ai pas pu faire de discours.

Pendant la cérémonie d'enterrement, c'est moi qui ai allumé les cierges qui entouraient le cercueil. Je trouvais ça bien de m'occuper de la lumière.

Quand je suis retournée à ma place, un des 4 cierges s'était éteint, je l'avais sans doute mal allumé. Ca m'a fait de la peine. Mais quand j'ai de nouveau relevé les yeux, il était rallumé.

Une petite lumière, un petit souffle pour me rappeler qu'il reste la tout près de nous. Quoi qu'il arrive.

 


 

Je ne sais pas si j'arriverais un jour à guérir de ce vide immense qu'il a laissé en moi.

Cette épreuve est de loin la plus douloureuse que j'ai pu vivre jusque là. Elle me rappelle à mon humanité tout entière. à la fragilité de la vie. à la force des liens.

Elle me bouleverse. me transforme. me donne un regard différent. une nouvelle perspective.

Je n'ai aucune idée de ce qui se passe en moi ni vers où j'avance.

Mais je sais qu'il est là, j'entends sa voix qui me guide.

 

Il était petit mon papa. Mais c'était le plus grand des hommes.

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Commentaires
M
Mots sensibles et texte émouvant... "Je trouvais ça bien de m'occuper de la lumière." Oui c'est bien, vous l'avez fait ainsi.
F
J'en ai les larmes aux yeux, je pense bien à toi... Bises
E
Je comprends... j'ai vécu cela.... mais la flamme qui nous unit nous reste toujours dans le coeur, tantôt elle nous illumine, ou nous réchauffe, tantôt elle brule par son absence, mais il n'est pas "parti" vraiment.<br /> <br /> Courage
Y
Mes larmes coulent rien qu'à te lire... il est bouleversant ton article Céline! Bouleversant d'amour, de tendresse, de douleur... Quelle belle personne!! Je l'imagine si bien à tes mots! il me fait rire à mon tour en imaginant "ses jeux de mots pourris", il m'émeut par sa simplicité et son humanité... <br /> <br /> Que ton cher papa repose en paix... qu'il continue à te transmettre cette belle énergie... <3
M
Bonjour Céline:)<br /> <br /> J'apprends seulement aujourd'hui le départ de ton Papa.<br /> <br /> J'aimerais t'apporter autant d'aide que ce que tu m'as apporté jusqu'à présent mais comme cela risque d'être difficile, je t'envoie tout ce que mon petit coeur peut envoyer de pensées douces et chaleureuses.<br /> <br /> Je t'embrasse bien fort:*
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